En République du Bénin, la date du 10 janvier de chaque année polarise l’attention de la majorité des citoyens du pays et suscite la curiosité de la diaspora transatlantique[1].C’est la fête nationale du Vodoun. Reconnu comme fête publique courant les années 1991 par les gouvernants, l’attribution d’un moment spécial pour faire honneur aux traditions endogènes à travers la célébration des rites et cultures revêt un caractère sacré qui favorise une plongée dans l’histoire et les traditions ancestrales du Bénin. Au regard du passé historique fort qui unit le Bénin et le monde par le truchement de la traite négrière, ce rendez-vous annuel culturel et cultuel est
devenu pour la diaspora africaine une réponse aux multiples questionnements
liés à la quête identitaire et à la redécouverte de la spiritualité. L’Organisation des
Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) dans son
nouvel agenda de politiques culturelles pour le développement et la
compréhension mutuelle nous rappelle que c’est à travers la culture que
nous donnons un sens à nos vies et développons notre identité.
Dans le but de consolider au sein de l’espace public, l’identité culturelle
reconnue au Bénin comme berceau du vodoun, les actuels gouvernants du pays ont
décidé de revisiter la manière dont la fête traditionnelle des religions
endogènes est célébrée au préalable. En prenant en compte la délimitation de
l’espace public[1] sous le prisme de Jürgen Habermas, nous comprenons que l’objectif des acteurs
de cette réforme culturelle est de faire des festivités un lieu symbolique où
les opinions, les pratiques, et cultes privés sont rendus publics pour
faciliter une meilleure compréhension de la culture Vodun.
A cet effet, depuis l’année 2023, un changement de paradigme s’observe dans le pays. Entrainant
une mutation d’une célébration sobre réduite à une journée vers une réelle institutionnalisation
de cette fête nationale traditionnelle des religions désormais ancrée dans les arts,
la culture et la spiritualité vodoun et qui s’étend sur plusieurs jours[2]. Cette modernité marquée par la création d’un festival d’art, de musique et de brassage culturel dénommé « Vodun Days » contribue ainsi à améliorer la perception générale de l’opinion publique sur la célébration de cette fête des religions traditionnelles. A travers, les artistes de renommée mondiale, invités et toutes les activités diversifiées qui enrichissent ce festival, la diplomatie culturelle du Bénin se retrouve renforcée.
En s’inspirant des travaux de LOMBARD Alain, nous pouvons comprendre que travailler au rayonnement de la culture béninoise s’inscrit dans la mise en place d’une stratégie de diplomatie d’influence[1]. De ce fait, à l’image desgrands évènements culturels mondiaux, la célébration de la fête des religions traditionnelles sous ce nouveau format devient un instrument de repositionnement de la République du Bénin sur la carte du monde comme une destination touristique très attractive. De plus, la tenue des festivités des religions traditionnelles à Ouidah , positionne cette ville comme un puissant outil de marketing urbain[2] pour attirer des capitaux et faciliter le développement social des habitants.
[1] LOMBARD Alain, La diplomatie culturelle, Presses Universitaires de France, Quesais-je, Paris, 2022, 128p
ROSEMBERG Muriel, Le Marketing urbain en question : production d’espace et dediscours dans quatre projets de villes, édition Anthropos, collection ville,Paris, 2000, 184p
PAQUOT Thierry, L’espace public, LaDécouverte, Collection Repères, 2024, 128p
Loi n°2024-32 du 02 septembre 2024fixant la fête annuelle des religions traditionnelles en République du Bénin.
CHIVALLON Christine, L’esclavage : du souvenir à la mémoire :contribution à une anthropologie de la Caraïbe, Karthala, 2012, 618p.